Jordan Ravindirane est membre du collectif Different Leaders depuis 2018. Il travaille dans la banque, au service de l’investissement dans des projets RSE. Un acronyme qu’on entend souvent, sans forcément savoir le définir.

 

Salut Jordan, Peux-tu nous dire ce que recouvre la RSE concrètement ?

La RSE, ou responsabilité sociale et environnementale, c’est la prise en compte par les entreprises des enjeux sociaux et environnementaux, comme l’amélioration de la qualité de l’emploi, la lutte contre la discrimination, le tri des déchets, l’économie d’énergie, ou le devoir de vigilance1Le devoir de vigilance c’est quoi ?

C’est une obligation d’entreprises donneuses d’ordres de prévenir les risques sociaux et/ou environnementaux liés à leur activité mais aussi à celles de leurs filiales et de leurs partenaires commerciaux.

Plus d’informations
. Il y a  un cadre légal imposé2Loi NRE, loi Grenelle II, article 173 de la transition écologique sont d’autant de réglementations imposant à des entreprises ou des institutions financières la publication d’informations liés aux enjeux sociaux et environnementaux des entreprises., et des bonnes pratiques, qui vont plus loin. Dans les années 90, la RSE était vue comme un principe de précaution pour réduire les impacts négatifs d’une entreprise. Aujourd’hui elle est de plus en plus vue comme la contribution active aux  objectifs de développement durable formalisés par l’ONU en 2015, et/ou la conformité à la norme internationale ISO 26000, laquelle a identifié les 7 thématiques que recouvre la RSE : la gouvernance de l’organisation, les droits humains, les relations et conditions de travail, l’environnement, la loyauté des pratiques, les questions relatives aux consommateurs, les communautés et le développement local.

Donc pour résumer : pour savoir ce que doit recouvrir un minimum la RSE d’une entreprise, vous pouvez vous appuyer sur ces deux référentiels  :

 

On entend souvent RSE et ESS dans les mêmes contextes. C’est quoi la différence ?

La RSE n’est pas une finalité en soi pour l’entreprise. Elle s’ajoute à une activité principale. Pour les structures de l’ESS, les pratiques socialement ou environnementalement responsables, c’est leur cœur de métier, leur action principale.

Aussi, historiquement, les acteurs de l’ESS (associations, coopératives, mutuelles, fondations, entreprises sociales) se sont construits sur des principes de gouvernance participative et de solidarité avec la question du profit en second plan. Ce n’est pas le cas des entreprises traditionnelles.

Autrefois vu comme un outil marketing ou un soin palliatif, la RSE est de plus en plus un enjeu stratégique pour les entreprises modifiant parfois leur activité principale. Il suffit de voir les récentes annonces de Danone vers une entreprise Bcorp ou la compagnie pétrolière BP pour une transition énergétique. Et elle est parfois complémentaire de l’ESS : par exemple quand des fondations d’entreprise financent des associations ou entreprises sociales (ESS), dans le cadre de leur politique RSE.

 

Comment peut-on savoir ce que les boîtes font réellement, en terme de RSE ?  

Attention, toutes les entreprises ne sont pas logées à la même enseigne : pour les petites et moyennes entreprises, l’obligation de publication n’existe pas encore, donc l’information est à chercher au cas par cas. Mais les leviers pour favoriser le développement durable ne sont pas les mêmes que pour les grandes entreprises.

Pour ces dernières3Plus d’informations sur les obligations en terme de publication de données extra financières par les entreprises, la déclaration de performance extra financière est obligatoire. Elle est donc publique, souvent disponible sur leur site internet. Parfois elle est fusionnée dans un rapport global : le « document universel de référence ».

Mais ces rapports ont encore des limites : certaines informations sont consolidées, d’autres non mentionnées, la méthodologie de mesure d’impact est rarement précisée… Pour y voir plus clair, mon “tip”, c’est de suivre les experts de ces thématiques sur les réseaux sociaux. Personnellement, je trouve particulièrement intéressantes les analyses de l’association @Les amis de la Terre, du média @Novethic ou du consultant @Jean-Marc Jancovici sur LinkedIn.

Il y a aussi la matrice de matérialité de chaque entreprise publiée sur le rapport RSE qui fournit une vision d’ensemble des enjeux de développement durable essentiels pour les parties prenantes

 

Pour terminer, comment fait-on la différence entre une politique RSE “marketing”, et une politique RSE sérieuse ?  

C’est sûr que si une entreprise qui extrait du pétrole promeut surtout le tri de ses papiers dans son rapport extra-financier, on peut se questionner sur la pertinence et l’authenticité de sa démarche RSE !

Pour ma part, j’aime  avoir une approche qui part du cœur de métier de l’entreprise, parce que c’est là que se situe son levier d’impact le plus significatif. Et ensuite, je me pose trois questions :

  1. En quoi est-ce que les activités liées au cœur de métier de l’entreprise peuvent  avoir le plus d’influence, positif ou négatif, sur les objectifs du développement durable définis par l’ONU par exemple ?
  2. Quelles solutions l’entreprise pourrait-elle mettre en place pour y remédier ?
  3. Quel travail fait-elle réellement sur ces leviers ?

Il y a aussi la matrice de matérialité de chaque entreprise publiée sur le rapport RSE qui fournit une vision d’ensemble des enjeux de développement durable essentiels pour les parties prenantes.

Bien sûr, tout cela demande une analyse bien plus poussée, et le diable se cache dans les détails. Mais si vous prenez déjà le réflexe de vous poser ces trois questions en lisant les rapports sur la politique RSE d’une entreprise, c’est un bon début !